À la tribune

Proposition de loi Favoriser les travaux de rénovation énergétique

Un véritable plan de rénovation pour les bâtiments publics, porté par l’État, est indispensable, déclare Michelle Gréaume

Ce jeudi 16 février 2023, le Sénat débattait autour d’une proposition de loi en provenance de l’Assemblée Nationale, visant à ouvrir le tiers-financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique.

C’est Michelle Gréaume qui a justifié le vote des Sénatrices et Sénateurs CRCE en leur nom à la tribune, vote qui consistait à s’abstenir.

Le texte a été adopté, et transmis en 2ème lecture à l’Assemblée Nationale.

Lire l’explication de vote de Michelle Gréaume

Monsieur le président,
Monsieur le ministre,
Chers collègues,

Je tiens à saluer la volonté du gouvernement, via son groupe à l’Assemblée, de mettre au cœur des débats la transition écologique.

Ce sujet est important, et nous devons y porter une attention particulière, tant les enjeux sont forts et dont chacune de nos actions et de nos décisions ont un impact sur l’environnement, sur nos vies et celles des générations futures.

Aujourd’hui, nous devons nous prononcer sur le financement des travaux de rénovation énergétique des bâtiments publics de l’État, des établissements publics et de nos collectivités territoriales, par un tiers-financeur.

Celle-ci est un sujet complexe et très couteux.
Cher.e.s collègues, vous le savez, on le voit au quotidien, la précarité énergétique est un réel sujet, et beaucoup de ménages subissent au quotidien leur logement mal isolé.

L’objectif premier est de répondre aux enjeux de transition écologique. Pour cela, nos bâtiments publics doivent être exemplaires. Ils s’étendent sur près de 400 millions de mètres carrés, dont les trois-quarts appartiennent aux collectivités territoriales. Chaque année, l’énergie pour chauffer des équipements ou des bâtiments représente 2,6% de la consommation finale d’énergie du pays.

Un bâtiment public sur deux est un établissement scolaire. Si l’école est mal isolée, la spirale négative se met en place : non seulement le coût de fonctionnement pèse sur le budget mais occasionne d’autres contraintes, telles que maladies, professeurs absents, canicule, des fermetures d’école…

C’est 400 millions de mètres carrés qu’il faut rénover.

Nous reconnaissons que cette proposition de loi apparait comme un outil pour accompagner la rénovation énergétique, notamment pour permettre à certaines communes, surtout en ruralité, de pouvoir lever les freins sur des investissements.

Nous serons très attentifs au suivi et à l’évaluation de la mise en œuvre de cette loi.

Cependant, nous restons très dubitatifs sur l’effet levier espéré par cette dernière.

La rénovation énergétique, quand on veut se conformer aux normes actuelles et bénéficier des meilleurs standards, nécessitent d’autres dépenses qui ne peuvent être dissociées de ces travaux mise en normes des réseaux électriques, sécurité, anti-incendie, normes PMR... sans compter les imprévus. C’est toute la structure du bâtiment qui doit être prise en compte pour réaliser des réelles économies d’énergies.

Il faut également prendre en compte les coûts financiers qu’impliquent les rénovations. En effet, cela nécessite de grands moyens humains dans un contexte où le secteur du bâtiment subit une importante pénurie de main-d’œuvre.

Des formations sont nécessaires pour répondre aux défis actuels de rénovation, certains ouvriers ne disposent pas de ces diplômes et d’autres n’ont pas les moyens d’envoyer les équipes en formation.
Concernant les TPE/PME, elles seront les sacrifiées de cette proposition de loi, au profit des grandes boîtes du BTP qui ont les moyens d’avancer des fonds pour des travaux. La crise sanitaire a mis en grande difficulté les petites entreprises.

De plus, 4 élus sur 10 affirment qu’ils n’accélèreront pas leur projet de transition écologique, au motif qu’ils n’ont pas les moyens de les mettre en œuvre. Les collectivités sont contraintes de faire des choix dans un moment de crise sociale et énergétique qui met en difficulté les finances locales. Contrairement à l’état, ces dernières doivent présenter un budget équilibré.

Les économies d’énergie espérées par cette proposition de loi, ainsi que l’impact sur l’environnement, ne semblent être réellement mesurées, laissant les collectivités sans visibilité et sans sécurité vis-à-vis de leur dette. Il ne faut pas non plus que cette expérimentation incite l’État à se désengager auprès des collectivités.
Un véritable plan de rénovation pour les bâtiments publics, surtout scolaires, porté par l’État, est indispensable.

Pour toutes les raisons évoquées, le groupe CRCE s’abstiendra sur cette proposition de loi. Lorsque les premières évaluations apparaitront sur le sujet, nous serons attentifs et nous ajusterons notre position si nécessaire.

Je vous remercie.

Imprimer cet article

Services publics

Economie

Pour la défense de la commune

Une question ?