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Retrouvez l’intervention de Michelle Gréaume sur le projet de loi de finances - Mission Défense

Après avoir augmenté de 46 % depuis 2017, les crédits de la mission Défense progressent de nouveau de 3,3 milliards d’euros cette année. Le poids énorme et la croissance exponentielle de ce budget comparé à d’autres budgets de la Nation, pour le climat, la réindustrialisation, le logement, la santé, l’éducation qui connaissent tous une contraction, me préoccupe grandement.

A titre d’exemple, en 2030, l’investissement dans le seul nucléaire militaire coûtera 21 millions d’euros par jour, soit le coût d’un collège !
Difficile également de ne pas rapprocher l’augmentation de 7,5% de ce budget avec la diminution de 35% des crédits consacrés à une aide publique au développement qui se réduit comme peau de chagrin.
Cette asymétrie de trajectoire budgétaire inquiète profondément notre groupe, tant elle symbolise l’implication de notre pays dans la grande dérive militariste planétaire et contribue par là-même au chaos mondial.
Privilégier de manière aussi manifeste l’usage de la loi du plus fort, la puissance militaire, au détriment du partage, du dialogue, de la diplomatie, de la recherche de solutions pacifiques, en pensant ainsi relever les innombrables insécurités collectives qui menacent notre Nation, constitue, à nos yeux, une lourde erreur stratégique.
2025 est l’année du lancement officiel du porte-avions de nouvelle génération pour un coût final de 10 milliards d’euros.
Symbole et instrument type des guerres expéditionnaires, son prédécesseur, le Charles de Gaulle, a été utilisé en Afghanistan, en Irak, en Libye. Depuis 20 ans ces expéditions n’ont réglé aucun des problèmes posés, sans que la bravoure et le professionnalisme exemplaire de nos soldats ne soit en cause, cela va de soi. La construction de ce nouveau bâtiment signe la persistance d’une logique produisant chaos, déstabilisations d’Etats, violences, persistance des conflits et du terrorisme.
Une logique archaïque de projection dont nous récoltons d’ailleurs encore aujourd’hui les fruits amers en Afrique.
Par ailleurs, la mission menée du 26 avril au 10 mai de l’année dernière, qui a mis notre porte avion sous contrôle américain de l’OTAN, confirme bien notre stratégie de rapprochement et d’un alignement toujours plus étroit à l’Alliance atlantique.
Ce même bloc atlantiste qui n’offre qu’une cohérence de façade, incapable d’enrayer les velléités bellicistes et expansionnistes de certains de ses membres.
J’en veux pour preuve la Turquie d’Erdogan qui, animée par la nostalgie de l’Empire ottoman, veut étendre sa toile en Syrie en éliminant les démocrates et laïcs kurdes et encourageant le retour des réfugiés syriens, quitte pour cela à soutenir et financer l’Etat Islamique.
J’en veux pour preuve également les propos expansionnistes des Etats-Unis de Donald Trump avec ses velléités sur le canal de Panama, sur le Canada et le Groenland et ceux, interventionnistes, d’Elon Musk soutenant une internationale européenne d’extrême droite ?
Sommes-nous résignés, nous français, à osciller entre une opposition largement passive et la soumission ? A nous rallier aux pratiques et aux valeurs de cette « nouvelle Amérique » ?
L’OTAN depuis sa fondation repose sur une promesse simple : protéger collectivement ses membres contre une agression extérieure. Mais que se passe-t-il lorsque l’agresseur potentiel n’est autre qu’un membre de cette alliance ?
Si mon groupe a toujours été constant sur cette question, aujourd’hui je veux le réaffirmer avec force.
Les récentes déclarations de Donald Trump redéfinissent l’OTAN, qu’il souhaite voir passer de pacte collectif de défense à un instrument au service des ambitions américaines.
Dès lors, dans un tel contexte de menace de la souveraineté du territoire européen, il apparait vital que la défense de nos territoires nationaux, passe par un renforcement de nos forces conventionnelles, et ne soit pas sacrifié au profit d’outils de projection aux lourds coûts budgétaires servant des opérations extérieures à la solde des Etats-Unis.
Je le dis avec gravité. Si, face à la dégradation du contexte stratégique et de guerre en Ukraine, l’adoption d’une nouvelle loi de programmation militaire nous semblait justifiée ; aujourd’hui, les velléités expansionnistes américaines marquent un tournant et doivent nous amener à reconsidérer le modèle d’armée à construire.
Ainsi, nous regrettons une répartition des crédits dotant de manière consubstantielle nos capacités de projection au profit d’une Amérique qui apparait de plus en plus menaçante au détriment de la stricte défense de nos territoires et alliés proches et nous alertons sur la réflexion stratégique qui anime ce budget.
C’est pourquoi nous nous abstiendrons.

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