À la tribune

Débat dans l'hémicycle

Michelle Gréaume s’exprime en faveur d’une loi contre les violences faites aux femmes en situation de handicap

Ce mercredi 8 janvier, le Sénat débattait sur une proposition de résolution intitulée Violences faites aux femmes en situation de handicap. C’est Michelle Gréaume qui s’est exprimé au nom du groupe CRCE à la tribune.

Madame la Présidente,
Madame la Ministre,
Mes chers collègues,

Je tiens tout d’abord à excuser ma collègue Christine Prunaud qui n’a pas pu être présente cet après-midi.
Je tiens à saluer l’initiative prise par plusieurs membres de la Délégation des Droits des Femmes, pour permettre la discussion de cette PPR.
Dénoncer et agir contre les violences faites aux femmes en situation de handicap, tel est le louable et nécessaire objectif de ce texte.
En effet, ces femmes sont des victimes toutes désignées qui peinent à dénoncer et à se faire entendre.
D’après un rapport de l’ONU, quatre femmes en situation de handicap sur cinq seraient victimes de tous types de violences.

De son côté, une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales de 2018 montre que les femmes qui courent le plus de risque d’être victimes de violences conjugales sont celles de moins de 25 ans, qui se trouvent en situation de handicap.
Même constat pour l’association Femmes Solidaires, qui a mis en place un numéro non surtaxé d’écoute pour répondre à la détresse des femmes handicapées : 35 % des violences signalées sont commises par le conjoint, même si de nombreuses femmes n’appellent tout simplement pas, notamment en cas de handicap mental.
Cette proposition de résolution formule 14 recommandations.
Parmi elles, je citerai l’individualisation de l’allocation adulte handicapé (AAH). Elle permettra de sortir de la dépendance économique, qui rend compliquée la possibilité de quitter son conjoint violent. Au-delà de cette question, je me permets de rappeler que notre groupe a déposé une PPL sur justement cette individualisation de l’AAH pour toutes les femmes handicapées, PPL qui a malheureusement été rejetée en octobre 2018.
Je sais que nombre d’associations qui accompagnent les personnes en situation de handicap n’ont pas compris que notre Haute-Assemblée ne soutienne pas cette proposition.
D’autant plus que 49% des femmes handicapées sont inactives et que 13% d’entre elles sont au chômage.
La formation des professionnels de justice et de santé est également impérieuse, l’éducation dès le plus jeune âge indispensable, la promotion de l’égalité femmes/hommes primordiale... Autant de recommandations portées depuis de nombreuses années par les associations féministes.

Dans les Côtes d’Armor de nombreuses initiatives en ce sens sont menées. L’association Athéol par exemple propose un accompagnement et un hébergement spécifique pour les femmes handicapées. La Maison des Femmes du département regroupant 21 associations dont ADALEA qui propose une veille et des réponses très spécifiques pour les femmes victimes de violences conjugales et familiales.

Une dernière remarque sur l’accessibilité des bâtiments pour les femmes en situation de handicap. Je souhaiterai rappeler l’incompréhension de mon groupe au sujet de l’allongement de 9 ans du délai d’accessibilité des lieux publics, voté ici-même, en 2015.
Appeler de ces vœux à une prise de conscience de la situation du handicap est une bonne chose, mais donner les moyens techniques, humains et financiers d’accompagner les femmes en situation de handicap, c’est mieux.

A ce propos, nous regrettons qu’aucune occurrence ne soit faite sur les moyens financiers pour accompagner ces mesures.

Former des professionnels, aménager des espaces d’hébergement adaptés, mener une politique publique d’inclusion... Autant d’objectifs annoncés mais sans budget véritablement alloué.

Dans le département du Nord, en 2018, sur 8000 appels reçus par l’association SOLFA, seule la moitié a pu être traitée faute d’effectifs. Même constat pour l’hébergement d’urgence, avec plus de 500 demandes qui n’ont pu aboutir. Et les chiffres de 2019, encore inconnus pour le moment, ne seront malheureusement pas meilleurs.
C’est dommage, d’autant que cette association a vu ses subventions sans cesse diminuer depuis 2010.
Les associations féministes mobilisées sur le sujet espéraient sincèrement que le Grenelle débouche sur un « plan Marshall » doté d’au moins 500 millions d’euros, voire d’un milliard. Une somme bien loin des 79 millions spécifiquement alloués à cette lutte. D’ailleurs, comment ne pas s’interroger sur le fait que les conclusions de ce Grenelle n’abordent même pas la question des femmes handicapées… C’est véritablement les grandes oubliées et c’est bien la preuve que cette PPR arrive à point nommé.
Parce qu’elle montre l’engagement du Sénat sur cette question et qu’elle représente un pas en faveur du droit des femmes, nous voterons sans réserve ce texte, co-signé déjà par 2 de mes collègues, Christine Prunaud et Laurence Cohen.
Je vous remercie.

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