À la tribune

Après les conclusions de la CMP sur la réforme des retraites

"À dix sur quatorze, vous avez voté les 64 ans. Quelle légitimité ?!"

Jeudi 16 mars, 14 parlementaires se sont réunis au sein d’une Commission Mixte Paritaire (CMP) pour rediscuter les termes du PLFSS rectificatif, qui modifie l’âge légal de départ à la retraite.

Le Sénat devait approuver ces conclusions, c’est Cathy Apourceau-Poly qui s’est exprimée au nom des sénatrices et sénateurs du groupe CRCE.

Lire l’intervention de Cathy Apourceau-Poly au nom du groupe CRCE

Monsieur le Président,
Cher.e.s collègues,

Sans surprise, la Commission Mixte Paritaire a trouvé un accord sur cette réforme des retraites.
À dix sur quatorze, vous avez voté les 64 ans. Quelle légitimité ?!

Rien d’étonnant puisque Républicains, centristes et Renaissance sont favorables à l’allongement de l’âge légal à 64 ans. Nous allons examiner les conclusions de la CMP sans la mise en ligne du rapport, mais bon, sur les bancs de la droite, plus rien ne vous gêne, rapport ou pas : vous voterez !

Lors de cette CMP hier d’ailleurs, à l’article 14, alors que celle-ci était loin d’être terminée, vous avez sorti un communiqué annonçant une CMP conclusive. Il aura fallu moins de temps en CMP pour « dealer » l’avenir de notre pays qu’il n’en a fallu au Sénat pour déposer un amendement de réécriture de l’article 7, qui a fait tomber 1 300 amendements.

Nous n’oublions pas non plus que la majorité présidentielle et la majorité sénatoriale veulent imposer une réforme à laquelle sont opposés 70% des Français et 90% des actifs.

Cette minorité politique a décidé, à une majorité de 10 sur 14, en CMP, du sort de notre avenir.

A la crise sociale et environnementale, le Gouvernement et les droites parlementaires ont décidé d’ajouter une crise parlementaire et démocratique. Vous imposez une régression sociale en ayant recours aux artifices de la Constitution et du Règlement du Sénat. Depuis deux mois, le peuple vous dit non. Ils étaient encore des milliers dans la rue hier pour la huitième fois, pour refuser votre projet.

Nous avons dénoncé votre projet injuste, inefficace et impopulaire.

Mais votre obsession s’est transformée en aveuglement. Le texte issu de la CMP acte une réforme profondément injuste, qui va s’appliquer dès le 1er septembre, et contraindre des milliers de concitoyens de retarder leur pot de départ en retraite de deux ans. Le Gouvernement a donc accepté le contrat de fin de carrière des Républicains ; en 2006, un contrat du même type avait été instauré pour un résultat nul.

Le Gouvernement devrait mettre autant d’énergie à lutter contre la fraude patronale aux cotisations sociales et contre l’évasion fiscale ! Les sommes recouvrées permettraient de financer notre système de retraite, sans imposer deux années supplémentaires de vies brisées.

Contrairement aux affirmations du Ministre Gabriel Attal, l’équilibre du système de retraite n’est nullement garanti par cette réforme. L’équilibre est assuré par la baisse de la subvention d’équilibre de l’État au régime de retraite, et notamment le gel du point d’indice des fonctionnaires et la réduction de leur nombre, qu’ils soient territoriaux ou hospitaliers. Votre dogme libéral vous fait perdre la raison.

Ce sont les politiques d’austérité qui ont entrainé le déséquilibre de notre système. Je rappelle que le COR détaille dans son rapport que les mesures d’économie sur la masse salariale publique se traduisent par une détérioration du solde du système de retraite.

Ce sont les choix faits par la droite sous Nicolas Sarkozy qui permettent aujourd’hui aux parlementaires Les Républicains d’exiger la généralisation de la capitalisation dans notre système par répartition.

Le refus de mettre à contribution les plus riches, le refus de mettre à contribution les dividendes, le refus de mettre à contribution d’élargir l’assiette de cotisation démontre les intérêts de ceux que vous protégez. Vous avez même refusé l’augmentation de la cotisation employeur, pourtant proposée par le Haut-Commissariat au plan, pour garantir la pérennité du système de retraite.

Vous faites passer les intérêts financiers avant la prise en compte de la pénibilité, des inégalités salariales entre les femmes et les hommes. La suppression des régimes spéciaux est une vision éclairante de la manière dont vous concevez la prise en compte de la pénibilité des métiers.

En conclusion, nous avons assisté à un marché de dupes entre le Gouvernement et les Républicains qui ont renoncé à leurs amendements sur les carrières longues et la prise en compte des risques chimiques. Vous portez un projet de classe contre les travailleurs et les travailleuses.
La fébrilité du pouvoir monte avec la menace du 49-3 de plus en plus menaçant.

Avec le Gouvernement, vous pouvez utiliser tous les coups de force antidémocratiques, comme vous l’avez fait ici. Vous ne convaincrez pas les Français du bien-fondé de votre réforme, qui vise à les faire travailler jusque 64 ans, bien au contraire. Le groupe CRCE s’opposera jusqu’au bout à cette réforme et soutiendra le mouvement social."

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