Questions au gouvernement

Question écrite avec réponse au Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse

Conditions de mise en œuvre des « groupes de besoins » au collège

Question écrite publiée au Journal Officiel le 28 mars 2024
Réponse publiée au JO le 16 mai 2024

Mme Michelle Gréaume appelle l’attention de Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse sur l’impact de la mise en œuvre des groupes de niveau, désormais dits de « besoins », au collège.

Ils sont issus d’une réforme décidée sans concertation, qui visait au départ à instaurer des groupes de niveau en français et mathématiques pour les élèves de 6e et 5e dès la rentrée 2024, pour ensuite s’étendre aux classes de 4e et 3e à la rentrée 2025.

L’arrêté publié le 17 mars 2024 au Journal officiel et la note de service qui en découle ont modifié la portée de ce texte, qui fait reposer sur les équipes pédagogiques la responsabilité de former ces « petits groupes » et de réexaminer leur pertinence tout au long de l’année scolaire.

Les collèges vont devoir inventer une forme d’enseignement qui n’existe pas actuellement, qui pourrait s’apparenter à une véritable « usine à gaz » en matière d’organisation (d’après le principal syndicat des chefs d’établissement), et le tout sans le moindre apport de moyens financiers pour ces établissements.

De plus, la crainte d’un regroupement durable d’élèves en difficulté, qui serait, de l’avis de tous les acteurs du secteur, catastrophique pour leur évolution, n’est toujours pas levée. Mener à bien un projet ambitieux et adapté aux élèves, ce qui est, de l’avis des inspecteurs d’académie, loin d’être le cas aujourd’hui, nécessite plus d’enseignants formés et mieux rémunérés, et moins d’élèves par classe.

Or, depuis 2017, 8 000 postes d’enseignants qui ont été supprimés, et la perspective est encore à la réduction des effectifs. La France est le pays d’Europe où les classes sont les plus chargées. Triste record, qui résonne nécessairement avec les résultats en baisse obtenus par les élèves ces dernières années lors des évaluations nationales. Or, sans moyens supplémentaires, on ne pourra répondre à aucun besoin du système scolaire actuel. Pire, beaucoup redoutent que la réforme vienne accentuer les inégalités sociales et fragiliser les établissements en les désorganisant.

Elle lui demande donc si elle envisage une autre réforme, établie en concertation avec les personnels éducatifs et de direction, les parents d’élèves et les syndicats, et qui répondrait aux besoins que tous expriment de longue date, à la fois en matière de valorisation du métier de professeur, et aussi sur l’amélioration des conditions de travail et d’apprentissage en classe.


Réponse de Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse

Les efforts menés depuis 2017 sur le premier degré ont permis d’améliorer le niveau des élèves à l’entrée en 6e. Cependant, les évaluations nationales montrent que 27 % des élèves ont des difficultés en français et 32 % en mathématiques à ce moment de leur parcours scolaire.

Le même constat se retrouve à la sortie du collège, révélé aussi bien par les résultats aux épreuves nationales du diplôme national du brevet que par l’enquête PISA 2022. Ces constats confirment la nécessité de mieux faire réussir les collégiens, selon leur niveau, des plus fragiles aux plus avancés en leur offrant des modalités d’enseignement plus adaptées à leurs besoins.

Ainsi, à compter de la rentrée prochaine, pour les classes de 6e et de 5e, les enseignements de français et de mathématiques sont organisés en groupes de besoins, sur la totalité de l’horaire hebdomadaire. Pour les autres disciplines, c’est-à-dire pour deux tiers des heures de cours, la classe demeure l’organisation de référence. Pour l’ensemble des groupes, les programmes et les attendus de fin d’année sont identiques.

L’objectif est de prendre en charge des groupes d’élèves plus homogènes pour permettre d’adapter les pratiques pédagogiques et de mieux soutenir ceux qui en ont le plus besoin. C’est pourquoi les groupes qui comportent un nombre important d’élèves en difficulté seront en effectifs réduits. L’organisation retenue par les établissements doit permettre de constituer des groupes flexibles et évolutifs en fonction des besoins et compétences des élèves.

Si les établissements le souhaitent, il est possible de regrouper les élèves conformément à leur classe de référence, pour une ou plusieurs périodes, sur un total pour l’année scolaire de une à dix semaines, afin de garantir à la fois la cohérence des progressions pédagogiques des différents groupes et la recomposition des groupes pour les périodes suivantes. Les moyens déployés dans le cadre de la rentrée scolaire 2024 tiennent compte des spécificités des collèges et doivent permettre la mise en œuvre des groupes de besoins en français et en mathématiques, tout en maintenant les autres dispositifs (groupes en sciences, enseignements facultatifs notamment).

Enfin, la décision de mettre en œuvre des groupes de besoins s’appuie sur de nombreuses recherches. Les études empiriques montrent que l’organisation flexible de groupes homogènes constitués en fonction du niveau de maîtrise des compétences produit des effets positifs, particulièrement sur les élèves les moins avancés (Dupriez et alii, 2003 ; IDEE, 2023). De plus, les pays tels que la Suisse, la Suède ou le Danemark, qui ont adopté une organisation en groupes flexibles répartis selon les besoins des élèves, pour tout ou partie des enseignements, obtiennent des performances scolaires supérieures à celles des élèves français dans les classements internationaux en fin de collège, tout en réduisant l’impact des inégalités sociales à l’école.

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