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Intervention générale sur proposition de loi

Oui à l’indemnisation des victimes de la Covid-19

Ce jeudi 25 juin 2020, le Sénat étudiait une proposition de loi visant à la Création d’un fonds d’indemnisation des victimes du covid-19.
Michelle Gréaume, au nom du groupe CRCE, a prononcé l’intervention générale et annoncé leur intention de voter pour ce texte, qui va dans le sens du progrès.

Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,

La crise de la Covid-19 a mis en lumière les « héros en blouse blanche » applaudis tous les soirs à 20h. Mais leurs efforts n’ont pas été sans risques puisqu’un grand nombre a été contaminé et guéri. Certaines et certains en ont conservé des séquelles tandis que d’autres en sont malheureusement décédés.

Au 11 juin, on dénombrait 30 675 cas de contamination dans les établissements de santé :
• 84% étaient des professionnels de santé et près de 10% des professionnels non soignants.
• Parmi les soignant.es, 29% étaient des infirmières et des infirmiers et 24% des aides-soignantes et des aides-soignants.

Nous espérons que, lors des conclusions du Ségur de la Santé, les efforts et les sacrifices de ces femmes et ces hommes ne seront pas oubliés.

De la même manière, lorsque la République rendra hommage aux victimes il ne faudra oublier de citer, ces 16 professionnels de santé décédés pour essayer de sauver la vie des autres.

Mais les personnels hospitaliers n’ont pas été les seuls à avoir pris des risques durant la pandémie et à avoir poursuivi leur activité.

Il y a eu également les pompiers, les policiers, les caissièr.es des magasins d’alimentation, les livreuses et les livreurs des plateformes, les égoutiers, les postiers, les éboueurs, et l’ensemble des travailleuses et des travailleurs qui ont travaillé pour le pays.
Eux aussi, au péril de leur santé, parfois de leur vie.

Vous me permettrez d’avoir ici une pensée particulière pour ces intérimaires, envoyés en 1ère ligne, souvent sans protection particulière, sans formation aux gestes de sécurité ou sanitaires.
Que ce soit chez Amazon, ou sur les plateformes logistiques pour ne citer que ces deux exemples.

A ce propos, la proposition de mettre à contribution les géants du numérique pour financer votre texte apparaît tout à fait pertinent. Certains géants du numérique ont profité de la pandémie en réalisant un chiffre d’affaire exceptionnel tout en maintenant leurs salarié.es sans dispositifs de protection.

L’enjeu est donc d’accorder reconnaissance et réparation à toutes les victimes de la Covid-19, salariés du privé, fonctionnaires, indépendants ou bénévoles, quel que soit leur statut, qui ont apporté leur aide dans la lutte contre l’épidémie et qui en gardent de graves séquelles.

C’est l’objet de cette proposition de loi, visant la création d’un Fonds d’indemnisation spécifique pour l’ensemble des victimes de la « covid-19 ».

Ce texte cherche à trouver une solution à une maladie exceptionnelle pour laquelle notre système actuel de réparation des maladies professionnelles ne semble pas adapté.

Actuellement, une demande de reconnaissance d’une pathologie non inscrite dans le « tableau des maladies professionnelles », c’est le cas de ce virus, met 8 mois à aboutir avec une réparation non intégrale.

A cela, il faut ajouter des difficultés spécifiques, dont l’absence de tests au départ de la pandémie, qui rendent encore plus difficile l’établissement du lien direct avec l’exposition professionnelle.
Enfin, cette pandémie aveugle a touché aussi bien des fonctionnaires que des salarié.es, des travailleurs indépendants, ou des bénévoles pour lesquels les voies de reconnaissance des risques professionnels sont multiples.

La solution préconisée par nos collègues socialistes, afin de ne pas décourager les victimes, nous semble judicieuse face à une maladie qui ne rentre pas dans les cases actuelles de notre système de réparation.
Mais je veux insister sur le fait que, ce fonds selon nous, doit être complémentaire à la demande de reconnaissance de la Covid-19 comme maladie professionnelle. C’est une revendication portée par l’ensemble des organisations syndicales et par les associations de victimes comme la CAVAM, l’ANDEVA, la FNATH et d’autres.

J’ai d’ailleurs ici un courrier envoyé par les associations « Covid-19 Grand Est », « Comité de Défense des Travailleurs Frontaliers de Moselle », « ADEVAT-AMP » et le Docteur LUCIEN PRIVET qui m’ont interpellé pour que la pathologie COVID-19 soit inscrite au tableau 76 des maladies professionnelles car je cite « si elle n’est pas inscrite dans un tableau, une reconnaissance au titre d’une maladie professionnelle d’une pathologie Covid-19 s’apparentera à une mission impossible ».

Notre groupe avait déposé un amendement prévoyant la reconnaissance de la Covid-19 au sein du tableau de classification des maladies professionnelles mais il a été jugé irrecevable au titre de l’article 40.
Pour nous, ce texte est une avancée pour les victimes, même si nous avons quelques critiques à formuler.
Tout d’abord, concernant la gouvernance du fonds de réparation, que nous aurions préféré confier au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, où siègent par ailleurs les organisations des victimes comme l’ANDEVA et la FNATH.

L’ONIAM, dans sa composition actuelle qui accorde une place très minoritaire aux organisations syndicales, est loin d’être paritaire.

D’autre part, nous sommes inquiets du message potentiellement adressé au patronat, qui se plaint beaucoup de sa contribution à la branche Accidents du Travail-Maladies Professionnelles.
Il ne faudrait pas envoyer un signal, même involontairement, de délaissement de la branche ATMP au profit de fonds spécifiques pris en charge par d’autres.

Une réflexion enfin, concernant la complexité du processus actuel de reconnaissance d’une maladie professionnelle, qui devrait nous conduire à lancer une réflexion globale pour en améliorer l’accès, en réduisant les délais et en permettant une meilleure réparation des victimes.

Notre groupe votera donc pour ce texte, qui va dans le sens du progrès pour les victimes directes ou indirectes de la Covid-19, tout en rappelant la nécessité de reconnaître cette maladie comme maladie professionnelle.

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Commission des affaires sociales

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