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« Parlementaires, garde à vous ! »

La chronique d'Eric Bocquet - Vendredi 8 juin 2018

On évoque beaucoup ces temps-ci, la réforme constitutionnelle, M. Macron et son gouvernement déclarent l’objectif d’accélérer et de rendre plus efficace l’action du Parlement dans la production de la loi. Ça, c’est l’affichage en vitrine.

En vérité, il vaut mieux entrer dans le magasin, « Chez Jupiter » pour bien évaluer les produits que l’on veut nous vendre. Evidemment, il est très « populaire » par les temps qui courent d’annoncer la réduction du nombre de parlementaires, compte tenu des « affaires » et compromissions qu’une petite minorité d’entre eux à donné à voir à une opinion publique ulcérée qui attend depuis très longtemps que la vie s’améliore enfin.

Un collègue de notre groupe au Sénat, Pierre-Yves Collombat, utilise l’expression de « populisme chic » pour qualifier la démarche du Président. Et pourtant, à y regarder de plus près, et après avoir séparé les scandales inacceptables de la nécessité d’un Parlement renforcé dans cette République, il nous faut réfléchir à ce qui est en train de se préparer pour notre démocratie.

Jupiter veut tous les pouvoirs et donc ne plus s’embarrasser des « corps intermédiaires » dans l’exercice de sa fonction.

D’abord, il faut que vous sachiez que la France ne compte pas plus de parlementaires que les autres démocraties comparables, avec 925 députés et sénateurs pour 67 millions d’habitants, elle compte un parlementaire pour 73 000 habitants, ce qui nous situe dans la moyenne des démocraties comparables : Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni.

La comparaison avec les Etats-Unis n’est pas pertinente puisqu’aux USA, l’Etat fédéral coexiste avec des Etats fédérés, chaque État étant doté de son propre Parlement.

Regardons maintenant du côté de notre histoire nationale. L’Assemblée Constituante de 1789 comptait 1145 membres. En 1848, avec l’instauration du suffrage universel, l’Assemblée compte 705 membres. Les pouvoirs les plus « autoritaires » se sont toujours attaqués au Parlement dans notre pays. Sous le Régime du Premier Empire, il n’y eut plus que 300 députés et 100 sénateurs. Le coup d’Etat de 1851 de Napoléon III proclame la dissolution de l’Assemblée Nationale. En 1940, aux heures les plus sombres de notre histoire, sous Vichy, Pétain suspend toute vie parlementaire (ainsi que la déchéance des députés du Parti communiste français).

L’histoire montre bien que chaque fois que la démocratie a progressé, le nombre de parlementaires a été augmenté, à l’inverse, chaque fois que l’Exécutif a voulu réduire le rôle du Parlement, il a réduit le nombre de parlementaires.

Nous reviendrons sur ce débat bien évidemment. Si cette réforme s’applique, le déséquilibre entre le pouvoir exécutif et le législatif s’aggravera considérablement.

Les consciences doivent s’éveiller !

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